Chers collègues assesseurs,
vous avez été comme beaucoup présents au rendez-vous républicain des élections, quel que soit votre bord politique. Bravo.
Voilà ce qu’un assesseur parmi d’autres voudrait déclarer.
J’ai été choqué, au cours des quatre dernières consultations auxquelles j’ai participé en tant qu’assesseur, de voir mes collègues se comporter au-delà de ce qu’un devoir de réserve devrait imposer. Il ne s’agit pas, soyons clairs tout de suite, de préférences politiques, ou de tentatives d’orienter le vote, mais plutôt de comportements qui mettent mal à l’aise les électeurs.
Je résume :
– certains assesseurs ne peuvent s’empêcher de situer l’électeur en face de lui – est-il parent d’un tel, qui porte le même nom, est-il l’ami d’un autre, etc… En un mot, sans volonté maligne, mais davantage mu par une curiosité de voisin ou de parent, l’assesseur peut donner à l’électeur l’impression d’être soumis à une enquête de voisinage. J’ai ressenti à ce moment de la gêne chez les électeurs, qui voulaient simplement voter, et ne pas répondre à un flot nourri de questions;
– certains assesseurs ne peuvent s’empêcher de faire une blague, ou une remarque qu’ils pensent subtile aux électeurs. Ceci, une fois fois encore, non pas dans une volonté de blesser, mais d’établir un lien avec l’électeur, au risque de dérapage involontaire;
– certains assesseurs croient bien faire en félicitant les jeunes électeurs de venir voter, et en les louant de leur acte citoyen. Or, des parents de jeunes électeurs nous ont fait part de la gêne de leurs enfants quand ils se voyaient ciblés, certes positivement, en raison de leur âge, mais de façon répétée et insistante. L’âge n’est pas une qualité, et, que l’on soit très jeune, ou très âgé, cela ne doit pas être soumis à commentaire;
– certains assesseurs transforment une journée électorale en réunion amicale, voire en concours de blagues : un électeur peut se sentir gêné de pénétrer dans une enceinte bruyante, agitée par des rires, voire animée par des querelles entre assesseurs;
– certains assesseurs perdent leur neutralité et leur contrôle quand un électeur se trompe dans les procédures de vote. Quelles que soient les hésitations des électeurs, un assesseur est là pour lui simplifier le vote, dans le respect du code électoral, mais jamais pour le juger, le sermonner.
Les pouvoirs publics se plaignent de ce que les électeurs désertent le chemin des urnes. Sans vouloir faire reposer cette désertion sur des pratiques maladroites de la part des assesseurs, il serait sain de faire passer auprès de ces derniers un certain nombre de règles à adopter pour ne jamais susciter de réticence chez les électeurs. Il n’est pas question, bien entendu, d’interdire tout dialogue entre assesseurs et électeurs : quand on se connaît, se dire bonjour, se serrer la main, échanger quelques mots est bien évidemment du domaine de la civilité la plus élémentaire.
Il serait donc profitable pour la vie républicaine d’éditer un petit nombre de règles de bonne conduite pour les assesseurs et de les faire connaître à ceux-ci avant leur prise de fonction :
– courtoisie et bienveillance dans tous les échanges avec les électeurs;
– interdiction de faire des commentaires aux électeurs sur leur âge, leur sexe, leur habit, leur nom, leur quartier, leur voisinage, leurs connaissances;
– réserve et discrétion entre assesseurs, quand les électeurs sont dans le bureau de vote.
Je laisse aux bons soins des autorités compétentes le devenir de ces simples constatations – partagées par plusieurs de mes collègues au cours des élections dans lesquelles j’ai été assesseur.
Xavier Malbreil, élu Pamiers citoyenne.