30 ans au service des plus en difficulté !
Bernard Penalba, candidat de notre liste, nous parle des « Maisons de la Solidarité » aujourd’hui disparues
En 1988 Michel Rocard alors premier ministre fait voter la loi instaurant le RMI (Revenu Minimum d’Insertion) qui permet d’octroyer une aide financière aux plus démunis en contrepartie de la signature d’un contrat d’insertion engageant le bénéficiaire dans des actions d’insertion.
Depuis 7 ans j’animais pour le Greta de l’Ariège (GRoupement d’ETAblissements publics locaux d’enseignement) des actions d’alphabétisation et des stages pour jeunes en difficulté, et je souhaitais ouvrir ces actions vers d’autres publics.
Le conseil général de l’Ariège en charge de la partie insertion du RMI était en recherche de propositions pour ce nouveau dispositif, j’ai donc proposé avec deux autres personnes la création des Maisons de la Solidarité de l’Ariège rassemblant un large partenariat (le département, l’état, la CAF (Caisse d’Allocations Familiales), les mairies de Foix et Pamiers) ; la gestion étant confiée au Gréta, j’ai dirigé et animé ces structures de 1989 à 2010.
Deux lieux inédits en France furent donc ouverts en 1989 sur Pamiers et Foix, suivis rapidement de Saint Girons et Tarascon.
Le projet précis sur le fond mais souple dans la forme avait pour but de prendre la personne dans sa globalité, de travailler dans la durée, en portant une attention particulière à tout ce qui permettait de tisser ou retisser des liens sociaux.
Pour cela nous avons mis en place un certain nombre d’outils tant collectifs qu’individuels qui se sont développés au fil des années en associant autant que faire se peut les bénéficiaires ; en prenant autant en compte les directives des donneurs d’ordre que les besoins des personnes.
Les outils :
Des centres de ressources véritable cœur des Maisons sont ouverts et offrent la possibilité de consulter la presse, boire un café, de téléphoner (pas de portable), d’accéder à des documentations, d’avoir un conseil, l’aide d’un professionnel, d’organiser des micro-projets collectifs, de rencontrer d’autres personnes … de prendre des décisions collectivement à travers « les conseils de Maisons » (démocratie participative avant l’heure ?)
Des ateliers de remise à niveau, d’alphabétisation, de lutte contre l’illettrisme avec à l’époque les premiers accès à l’ordinateur et à internet.
La préparation à des diplômes tel que le permis de conduire (aide méthodologique et financière), première entrée vers l’autonomie, brevet de secourisme, préparation de diplômes d’aide à domicile…
Développement personnel : permettre à des bénéficiaires de reprendre confiance en eux en travaillant sur leur projet personnel et ou professionnel.
Accompagnements de projet
- Mise en place des passages protégés (un des premiers en France) aux sorties des écoles de Foix et Pamiers avec des agents en contrat aidé.
- Accompagnements d’équipe en contrat aidé pour le débroussaillage et l’entretien des chemins de randonnée avec un public très désocialisé.
- Organisation d’atelier bricolage et récupération de mobilier (atelier brico-meuble) avec au début un public en voie de sédentarisation.
- Et aussi, théâtre, club santé, réseaux d’échange de savoirs, vidéo, sophrologie … pour développer les savoirs faire mais aussi les savoirs être.
Une équipe : Coordonnateur, formateurs, travailleurs sociaux, accueillants, psychologue, bénévoles ont pendant 30 ans construit et défendu un esprit, une manière de travailler pour permettre à toute personne en difficulté de trouver un lieu, une écoute, des outils.
Evolution
Au fil des années, d’un fonctionnement de type collectif et participatif, la commande publique s’est orientée vers plus d’accompagnement individuel ciblé vers un retour à l’emploi.
Nous avons ouvert ces lieux à d’autres publics, personnes en situation de handicap, demandeurs d’emploi, jeunes suivis par la mission locale … des actions ont été externalisées : Maison d’arrêt et permanence dans des lieux éloignés. Nous avons également participé activement à la réflexion et fait des propositions sur l’insertion dans le département, restaurant d’insertion à Foix, location et prêt de mobylettes et voitures (AMI) à Pamiers, jusqu’à la promulgation du RSA (revenu de solidarité active) en 2009 qui a orienté et organisé l’offre d’insertion de manière différente.
En 2019 nous avons fêté les 30 ans des Maisons de la Solidarité, 4 mois plus tard le conseil départemental a lancé un appel d’offre et octroyé le marché à une entreprise privée hors département pour accompagner les 800 bénéficiaires suivis « vers l’emploi ».
En janvier 2020 les Maisons de la Solidarité ont fermé leurs portes définitivement.
Que peut-il rester de ce projet dans le contexte actuel ?
L’augmentation de la précarité qui se profile nécessite des propositions fortes ; besoin d’avoir un guichet unique d’accueil et d’orientation animé par la municipalité qui aura ainsi les rênes de sa politique, prendre la personne dans sa globalité , être un lien entre les différents acteurs , inciter à ce que la formation et l’ insertion sociale et professionnelle prennent en compte l’aspect humain et surtout promouvoir la participation active des citoyen(ne)s, véritable clefs de la réussite.
Il serait également intéressant pour « les jours d’après » d’engager avec d’autres partenaires une réflexion, un débat qui prendra en compte les nouvelles donnes par rapport au travail, à la solidarité et à la justice sociale en organisant par exemple des états généraux autour de la thématique « précarité insertion solidarité »
Bernard Pénalba
« Tout groupe humain prend sa richesse dans la communication, l’entraide et la solidarité visant un but commun, l’épanouissement de chacun dans le respect de ses différences » Françoise Dolto